
La démocratie nous a été confisquée par la classe bourgeoise en 1793 et depuis, le peuple élit des riches qui font des lois de riches. De plus en plus de citoyens réclament un pouvoir qui parte de la base, de chacun des individus, et remonte pour le bien de tous, pour le commun. Partant de cette idée, chaque individu serait l’unité fondamentale de la société et à ce titre, son point d’équilibre. La pyramide traditionnelle se moque bien de l’individu que l’on peut exclure, traiter comme une marchandise, et depuis quelques années rendre même inexploitable, superflu ! Qu’importe les quelques pierres de la base qui s’effritent, englouties dans le sable. Il en restera toujours assez pour supporter l’édifice. Depuis des millénaires, le sommet de la pyramide nous fait croire que c’est dans l’ordre des choses, une loi naturelle qui exige des Papes, des Présidents, des Oligarques, des Penseurs, des Dieux ! On ne combat pas une loi naturelle et en ces temps de barbarie où les élites qui dominent au sommet de l’édifice se discréditent et n’ont plus à nous offrir que des projets cosmétiques pour camoufler leurs erreurs, où les impasses structurelles ne sont décryptées que pour annoncer un effondrement général, seuls les pessimistes semblent réalistes, seul le tragique peut encore donner sens à nos vies.
Et voilà en peu de temps deux initiatives qui chassent le tragique et ouvrent des chemins aussi réalistes que plaisants. Deux initiatives qui pourraient renverser la pyramide, l’une qui propose le pouvoir à chacun d’entre nous, l’autre qui restitue à chacun la liberté de vivre. La liberté, l’égalité à tous les étages, l’électricité en plus. Nul doute que la fraternité ne tarderait pas à suivre… J’entends déjà la foule des oiseaux de malheur s’alarmer : “L’auteur de ce blog débloque, il devient optimiste, il se met à croire aux lendemains qui chantent. Quelles mouches l’ont piqué ?” Non, je ne suis pas atteint “d’euphorisme aigu”, mais quand la pyramide est renversée, je m’en réjouis. Je vous explique…

Une association propose aux citoyens ordinaires et aux parlementaires de rédiger les lois ensemble. Parlement et Citoyens offre à quiconque s’inscrit sur le site la possibilité de proposer une loi, de la rédiger, de participer à un groupe de réflexion sur un problème qui le concerne, de lancer une pétition. Certes, cette association n’a rien de révolutionnaire et ne remet en cause ni la démocratie représentative, ni le mandat électoral sans contrôle populaire, encore moins le modèle économique qui coince toute politique sur les mêmes rails. Reconnaissons pourtant que l’idée est bonne en ce sens qu’elle se sert de l’outil informatique pour redonner la parole au peuple, qu’elle tend à renverser la pyramide traditionnelle. C’est un premier pas qui laisse augurer ce que serait une société enfin débarrassée de l’impératif économique, de l’échange marchand, de la tyrannie du profit. Ce qu’il y a de rageant dans notre monde dit moderne, c’est que nous avons tous les outils nécessaires pour un perpétuel va et vient des idées et des propositions entre les différents niveaux sociaux, du plus local au plus global, qu’un référendum permanent serait possible pour toute décision impactant la société (voir à ce sujet RIC-France), que la démocratie directe est enfin possible à grande échelle, et que cependant, nous continuons à penser comme si le numérique n’avait pas été inventé. Les utilisateurs du site Parlement et Citoyens vont vite s’en rendre compte et ne se s’arrêteront pas au modeste échange sur Google Hangouts avec un député sans mandat impératif ! Et de cela, je me réjouis…

Un autre collectif s’est intéressé au revenu de base. Un groupe de plus qui rêve ou fait le jeu de politiciens en mal de popularité, dites-vous. Certes, l’idée est dans l’air du temps et intéresse aussi bien à droite qu’à gauche. Mais là, ce qui change, c’est que ce collectif ne réclame rien à la classe politique, qu’il n’attend pas qu’un consensus se dégage entre ceux qui n’y voient qu’une incitation à la paresse, ceux qui s’imaginent qu’il n’y a qu’à…, ceux qui se battent sur la forme (Revenu de base ou d’existence, avec ou sans conditions, en complément ou à la place des autres prestations sociales…). Il n’attend rien, il le fait. La seule condition est de s’inscrire pour donner de l‘argent, pour bénéficier de 1000€ pendant un an, l’un ou l’autre ou les deux à la fois. Dès que le collectif a collecté 12 000€, l’un des inscrits, tiré au sort, bénéficie du revenu de base pendant un an, quelle que soit sa situation. Ça ne marchera pas dites-vous ? Des gens aisés ne vont-ils pas en profiter quand des indigents en auraient un urgent besoin ? N’est-ce pas une sorte de loterie juste bonne à faire rêver les gogos ? Au lieu de polémiquer ad vitam æternam, le collectif en fait l’expérience et se dote des moyens d’évaluer en permanence la pertinence du projet, l’usage fait de cet argent par les bénéficiaires, les effets bénéfiques autant que pervers qui s’en dégagent. Et là, je dis chapeau ! J’ai longtemps critiqué l’idée d’un revenu de base au motif qu’il est nécessairement adossé à des profits financiers et retarde la prise de conscience que la seule solution est de sortir de l’échange marchand. Mais cette initiative rejoint exactement ce que la plupart de mes amis de la “Désargence” espèrent : que la création, la production, la distribution…, la politique en somme, viennent enfin de la base au lieu de “ruisseler” sur le bas peuple, que les choix émanent enfin d’une expérience qui serait tentée, puis analysée, puis rejetée ou prolongée par ceux qui sont concernés. Et là, je redis chapeau !
Je reste persuadé qu’une société a-monétaire, où l’accès sans conditions aux biens et services remplacerait l’échange marchand, est de loin préférable à tout autre système, mais en attendant, ce "revenu de base autogéré" serait une voie pour y parvenir, ne serait-ce que par son aspect expérimental hors du champ politique centralisé actuel. Et de cela, je me réjouis ! Les trains n'arrivent pas toujours en retard!!!