Les informations de ces jours-ci sont propices aux lectures pacifistes. De Henry David Thoreau à Jean Cabut (dit Cabu), le choix est grand, les pages souvent superbes et variées. Être taxé de bêlant ne m’importune aucunement, d’utopiste encore moins ! A tout mal, chacun trouve le remède qui lui sied. On brandit sous mon nez la menace russe, la dictature Maduro, l’impérialisme chinois…, je me délecte de quelques pages de Tolstoï ou de Bertrand Russell. Ensuite, je vais mieux et me réjouis de la bêtise des “Faucons”, des Va-t-en-guerre” et de leurs supporters.
Il est vrai qu’en ce moment, ces gens-là, Monsieur, ils y vont fort ! Nicolas Maduro est le nouveau tyran à abattre et je vois la France, l’Allemagne, Le Royaume Uni, le Portugal, les Pays-Bas, comme un seul homme derrière Juan Guaido, avec l’aval de la Commission-européenne. Ce petit jeune, était inconnu de tous le mois dernier, aussi crédible qu’un Tsipras de 2015, aussi proche du peuple qu’un Macron, mais politiquement correct et adoubé par Wall Street et Trump. Le dit Trump, drapé dans sa dignité, se scandalise que Maduro n’ait pas encore démissionné et menace d’envoyer les GI sur le sol vénézuélien. Si les alliés de Maduro, la Chine, la Russie, la Turquie, poussent le bouchon un peu plus loin et soutiennent militairement leur copain bolivarien, cela nous fera une nouvelle zone de guerre collatérale du plus bel effet !
Au fait, j’entends très peu de journalistes expliquant que la “crise” au Venezuela a commencé juste après l’annonce par Chavès de négocier son pétrole en DTS et non plus en dollar. L’or noir se négocie habituellement en dollar, mais rien n’empêche un État d’utiliser ces “Droits de Tirage Spéciaux”, paquets de devises en dollar, euro, livre sterling, yen et yuan : un crime de lèse-majesté pour Trump. Je ne crois pas plus en la vertu de Chavès et Maduro qu’en celle des Trump, Macron, Merkel, Poutine, Erdogan et autres garants politiques des intérêts mondiaux. Mais c’est une raison de plus pour se méfier systématiquement de ce panier de crabe.
A propos, puisque je parle de DTS, il me revient en mémoire que Dominique Strauss-Kahn a écrit sur le site du FMI dont il était alors directeur : « À terme, le DTS pourrait aussi contribuer à donner plus de stabilité au SMI ». C’était en février 2011, et en mai, il se faisait bêtement piéger au Sofitel de New York ! Depuis des années, tout le Monde savait que DSK était un chaud lapin sautant sur tout ce qui pouvait porter jupon, mais c’est l’idée de concurrencer le dollar par le DTS qui lui valut l’assassinat politique. A l’époque, cela m’avait fait rire : par la tête ou par la queue, tous les coups sont permis en politique…
Nos médias manquent décidément de perspectives, d’esprit généalogique. Nous l’avons encore vu avec l’affaire du traité sur la Macédoine du Nord, où Tsipras et son homologue Zoran Zaev ont été présentés comme principaux acteurs. Il s’agissait à l’évidence de nous faire oublier la stratégie partagée par l’OTAN et la Commission européenne, les ambitions opposées d’Erdogan et de Poutine… Encore un panier de crabes géostratégique qu’il n’est pas sain d’expliquer aux peuples.
Par contre, il est sain d’expliquer aux Français que la loi anti casseurs votée hier est une grande avancée démocratique. Il est sain de prouver aux Européens que le traité de Lisbonne, qu’une majorité “populiste” refusait, a été et reste un gage de paix et de prospérité. Il est sain de convoquer le peuple à un grand débat national pour discuter d’une politique sans alternatives possibles…
Dame, si nous comprenions pour quoi et pour qui nos maîtres déclarent les guerres, plus personne n’accepterait d’y participer, par nos impôts ou contrainte par corps. Si nous comprenions que l’argent se condense mécaniquement entre les mains d’une minuscule ploutocratie, que le fameux ruissellement de la richesse sur le bas monde est un conte largement contredit par les faits, les abstentionnistes gagneraient toutes les élections. Si nous comprenions Emmanuel Macron quand il déclare avoir été élu sur un projet, sur de grandes orientations auxquelles il demeure fidèle, nous serions plus sceptiques sur l’issu du grand débat…