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            Dans l'avion le ramenant à Paris depuis Israël jeudi soir, Emmanuel Macron s'est emporté contre des personnalités politiques ayant pu soutenir l'idée que la France n'était plus une démocratie. "Essayez la dictature et vous verrez !"

            "Aujourd'hui s'est installée dans notre société - et de manière séditieuse, par des discours politiques extraordinairement coupables -, l'idée que nous ne serions plus dans une démocratie, qu'une forme de dictature se serait installée", accuse le président dans un entretien diffusé par Radio J (radio de la communauté juive).

            " Une dictature, c'est un régime ou une personne ou un clan décident des lois. Une dictature, c'est un régime où on ne change pas les dirigeants, jamais. Si la France c'est cela, essayez la dictature et vous verrez! La dictature, elle justifie la haine. La dictature, elle justifie la violence pour en sortir. Mais il y a en démocratie un principe fondamental: le respect de l'autre, l'interdiction de la violence, la haine à combattre". […] "Tous ceux qui aujourd'hui dans notre démocratie, se taisent sur ce sujet, sont les complices, aujourd'hui et pour demain, de l'affaiblissement de notre démocratie et de notre République." […]

            "Une démocratie, c'est un système politique où l'on choisit nos dirigeants. C'est un système politique où l'on choisit des représentants qui auront à voter librement les lois qui régissent la société. Cela a beaucoup d'exigence, cela veut dire que la liberté du peuple et sa souveraineté sont reconnues. Mais cela a une contrepartie, c'est que dans une démocratie, on a un devoir de respect à l'égard de ceux qui représentent et votent cette loi, parce que précisément, on a le pouvoir de les révoquer. On a l'interdiction de la haine, parce qu'on a le pouvoir de les changer!"

 

            Enfin un grand intellectuel qui explique aux Français ce que veulent dire les mots “dictature et démocratie” !!! Ne vous en déplaise, Monsieur Macron, les deux régimes politiques que vous décrivez ne supportent pas l’essentialisation (réduire une personne, un concept, à une seule de ses dimensions). Cette notion philosophique est étudiée en terminales, et les catégories de dictature et de démocratie figurent au programme d’histoire des lycées. Que vont penser de vous ces jeunes étudiants que vous méprisez si royalement ? Si les professeurs leur proposaient, à titre d’exercice pratique, d’analyser quelques-unes de vos phrases citées ici, vous découvririez enfin que vos approximations de langage relèvent d’un niveau à peine digne du collège.

            Il n’y a pas de frontière entre la démocratie et la dictature, mais juste une sorte de zone grise où la démocratie égratigne quelques-uns de ses principes fondamentaux, où la dictature s’amollit dans des concessions démocratiques. Le gouvernement Macron, s’il n’est pas à proprement dictatorial, n’est plus tout à fait démocratique. C’est bien le reproche que lui font ces “politiques coupables”, que lui fait le peuple des Gilets jaunes et des grévistes.

            Si la démocratie est un système politique où l'on choisit des représentants qui auront à voter librement les lois, il faudrait que ces représentants représentent réellement ceux qui les ont portés au pouvoir. Est-ce le cas du président Macron, élu par défaut, avec au mieux 20% de supporters ? Le peuple pouvait-il prévoir que le véritable programme de Macron était la mise à sac de tous les acquis du CNR et non l’idyllique alliance de “l’en même temps” ? Est-il démocratique d’imposer une réforme que la grande majorité des citoyens refusent avec entêtement depuis des semaines ? Est-il démocratique d’user d’ordonnances pour contourner le contrôle des assemblées d’élus, de priver les Députés d’un débat serein par une procédure d’urgence, d’affirmer si fort qu’un projet gouvernemental n’est pas négociable sinon à la marge ? Le pouvoir de révocation qu’évoque Macron ne peut aujourd’hui s’exercer que par la désobéissance civile, la grève, les manifestations, avec tous les risques que cela comporte (blessures graves, arrestations arbitraires, gardes à vue, procès baillons, pertes financières conséquentes…).  

            Plusieurs instances hors de France ont dénoncé ces dérives fort peu démocratiques, mais le gouvernement continue, droit dans ses bottes, à ignorer la vox populi ! Et c’est ce même gouvernement qui s’offusque quand tel ou tel dénonce une dérive dictatoriale. Certes la France n’est pas encore une dictature de style Franco, Pinochet, Pol Pot…, mais elle n’est plus tout à fait une démocratie, si tant est que le néolibéralisme que défend ce gouvernement soit compatible avec l’idée même de démocratie. En effet, mettre au premier plan l’économie, le profit, la concurrence, la compétition, la productivité en dépit de l’aspiration du peuple, de l’enjeu environnemental, des inégalités sociales qui explosent, est-ce encore du ressort démocratique ?

            Le jeune Macron qui a fait la une de tous les journaux, y compris de mode, de sport, de jeux, de fait-divers…, avant son élection, a pu paraître dynamique, moderne, réformiste, nouveau style. Il se révèle aujourd’hui tel qu’il est : profondément conservateur et élitiste, déconnecté de la réalité sociale, méprisant Jojo le Gilet jaune autant que les fainéants, les derniers de cordée, les ouvrières illettrées, les gens qui sont rien… Un bel exemple de démocratie qui met le démos au cœur du kratos !!!

 

            Allez, encore un petit effort et l’on comprendra qu’il n’y aura pas de démocratie possible tant que l’argent gouvernera le Monde…  Voir