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Ce matin, à 8 heures sur France Musique, une nouvelle m’a intrigué: Le Directeur Général de la Police Nationale s’est rendu hier à la préfecture de l’Essonne et a annoncé  vouloir créer une réserve de citoyens armés et en uniformes. Pour être au contact de la population, la police veut impliquer tous les citoyens. La Préfète de l’Essonne, Josiane Chevalier, va même un peu plus loin. « Chacun doit se sentir concerné par la sécurité, voire par sa propre sécurité. On est vraiment dans le concept de la coproduction de sécurité. »

Le but est clairement annoncé de produire ensemble de la sécurité par de vraies missions opérationnelles. Le DGPN Eric Morvan veut « dynamiser  notre réserve civile, c’est-à-dire la capacité pour des citoyens de venir épauler des policiers tout en étant eux-mêmes en uniformes et armés. » Son autre idée géniale est de renforcer les liens avec la police municipale dans des villes  qui seraient volontaires : « avec, pourquoi pas,  la possibilité de donner à des polices municipales des pouvoirs qu’elles n’ont pas encore. » Ces expérimentations vont commencer en janvier 2018 dans une vingtaine de villes en France, ce qui prouve qu’Eric Morvan n’est pas seul et qu’il est soutenu par des membres du gouvernement et des élus locaux.

En ces temps de funérailles, la nationale et la populaire, il est difficile de trouver une quelconque mention sur ce sujet dans les médias. Je me suis donc rabattu sur les sites officiels. Celui de la Police Nationale, parle bien de la possibilité de s’engager dans une réserve civile. Il faut pour cela être français, avoir entre 18 et 65 ans, avoir fait son service militaire ou la JDD, être de bonne moralité et médicalement apte. Les missions de soutien à la police vous seront proposées pour une période de 90 jours maximum par an et seront rémunérées. Le site de la préfecture de l’Essonne rappelle que la loi "Égalité Citoyenneté"  du 27 janvier 2017, offre à tous les citoyens de plus de 18 ans la possibilité de s’engager bénévolement auprès des policiers, dans des missions de prévention de la délinquance, de médiation, de solidarité ou d’éducation à la loi. Le site précise que les candidats reçoivent une formation de deux jours  (une journée de découverte et une journée d’intégration).  

Jusqu’à présent, seuls les anciens militaires et policiers pouvaient être armés et en uniformes dans la réserve. Il semblerait que le DGPN Eric Morvan et sa copine Josiane Chevalier pensent étendre ce droit à tous les réservistes. Il serait en effet inconséquent d’envoyer en mission des jeunes de vingt ans désarmés et non identifiables par un uniforme dans des banlieues à risques ou face à des djihadistes prêts à tout. Où est la limite à cette dérive sécuritaire ? Quelle différence y a-t-il entre une guerre civile et l’affrontement entre des manifestants et une milice civile dite réserviste ? Des réservistes n’ayant eu d’autre formation que la JDD et les deux jours réglementaires d’entrée dans la réserve pourraient-ils être armés ? L’enquête de moralité prévue se fonde sur quels critères (avoir participé au service d’ordre du FN est-il un atout ou une contre-indication ? Le concept "coproduction de sécurité", jusqu’où peut-il aller ? Personnellement, cette idée me fait penser à ces westerns dans lesquels un shérif réunit dans l’urgence un groupe de civils armés pour capturer un voleur de bétail dead or live !

L’obsession sécuritaire, le désir d’un  illusoire risque zéro est symptomatique d’une société malade. En outre, c’est le signe d’une amnésie généralisée. En effet, l’idée que la violence augmente de jour en jour et qu’avant tout était plus calme est un mythe érigé en lieu commun. Prenez n’importe quel registre de police de n’importe quelle petite bourgade française du 19ème siècle et vous constaterez que les fêtes de village pouvaient se terminer à coup de pierres et de gourdins, que les ouvriers français et italiens se battaient au couteau sur les chantiers, que les rues étaient à haut risque après 22 heures, etc. "Ce n’est pas seulement à Paris que le crime fleurit, nous, au village aussi l’on a, de beaux assassinats…" chantait Brassens !   

 

Tag(s) : #Société, #Coup de gueule