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La différence entre un Pitbull et Christine Lagarde ?...Parfois, le Pitbull lâche prise…

                En septembre et octobre 2017, j’écrivais sur ce blog deux articles intitulés « La fin du cash ou la fin du banquier » (voir)  et « L’alouette nous chante : “je vous plumerai” » (voir)  L’annonce de la fin du cash par Christine Lagarde, alors patronne du FMI, était passée quasiment inaperçue et la plupart des lecteurs de mon blog avaient manifesté leur scepticisme face à cette “innovation” qu’ils percevaient comme une simple manœuvre d’intoxication. “Christine Lagarde crie au loup pour des motifs purement politiques mais ne croit pas au loup” me disait un lecteur. “C’est trop gros pour qu’un gouvernement ose une telle opération“ insistait un militant d’ATTAC...

                Le projet défendu par Christine Lagarde de supprimer le cash devait être initié dès 2018 et, le temps passant, beaucoup se gaussaient de mes prédictions alarmistes qui ne se réalisaient pas. Et voilà qu’en 2020 arrive la crise du Covid qui mobilise les médias et détourne nos regards d’une crise financière qui semblait imminente. C’est par un article de Philippe Béchade, analyste boursier et rédacteur en chef de “La Bourse au quotidien” que le sujet réapparaît (voir). Depuis 2017, Christine Lagarde n’a pas changé d’avis et n’a rien lâché : il faut dématérialiser la monnaie pour permettre aux banques de ponctionner une part de tous les comptes privés sans risquer un bank-run.

                En passant du FMI à la BCE, madame Lagarde a pris du poids politique. Elle a rallié Angéla Merkel à son projet, elle a nommé un “Monsieur Crypto”, en l’occurrence Benoît Cœuré qui depuis 2019 est à la tête du pôle innovation de la Banque des règlements internationaux (BRI). Elle lance une grande enquête publique d’opinion concernant l’émission d’un euro numérique qui serait géré par une blockchain. Quand l’UE consulte les Européens, c’est généralement pour entériner un projet déjà bien ficelé. On sait depuis le référendum de 2005 qu’un Non, en français ou en néerlandais, se traduit par un Oui européen ! 

                Il est donc bon de rappeler ce qu’est ce projet de crypto-euro. La BCE est actuellement la banque centrale chargée de l’émission de l’euro et de la définition des grandes orientations de politiques monétaires de la zone euro. En émettant un euro numérique “grand public” géré par une blockchain, la BCE devient une banque de détail. Cet euro 2.0 pourra être en effet utilisé entre les banques et par l’ensemble des particuliers et des entreprises. Il s’agit ni plus ni moins qu’une crypto monnaie de type bitcoin rebaptisée CBDC (pour  Central Bank Digital Currency, en français: monnaie numérique de banque centrale). C’est une révolution du système monétaire international dont les effets sont prudemment occultés dans les médias. 

                Concrètement, la disparition du cash permettra aux gouvernements un contrôle total sur tous les mouvements d’argent que nous effectuons. Si l’on peut admettre la nécessité de lutter contre les trafics d’armes et de drogues, traquer les réseaux pédophiles et l’escroquerie, limiter l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent, comment admettre qu’un simple clic émanant d’un pouvoir central puisse nous tuer socialement ? En effet, le tout numérique, c’est la possibilité de bloquer le compte d’un particulier qui dérange. Sans cash, cela signifie l’impossibilité de percevoir un salaire ou un don, d’acheter une baguette de pain, de se déplacer… Et comment imaginer qu’une telle arme ne soit pas tôt ou tard utilisée par un gouvernement en crise ?

                Le tout numérique, c’est aussi la possibilité de ponctionner une partie de tous les comptes des particuliers et des entreprises pour renflouer une banque. Christine Lagarde ne s’en cache pas quand elle fait référence à l’épisode Chypriote de  2013. Non seulement elle y voit “une source d’inspiration” mais elle défend l’idée que tous les comptes pourraient être ponctionnés dès le premier euro (sans la limitation aux comptes de plus de 100 000€ comme ce fut le cas à Chypre) par soucis d’égalité ! Certains financiers parlent de ponctionner 10%, 20%, et pourquoi pas 30% pour éviter la chute d’une banque systémique ! Et comment réagir en l’absence de cash : changer de banque n’aura plus aucun intérêt, retirer son argent sera impossible. On comprend que Mme Lagarde y voit une “intéressante perspective pour l’avenir”.

                Si en 2017 on pouvait raisonnablement penser que ce holdup sur nos portefeuilles ne passerait jamais le barrage législatif, l’expérience du Covid change sérieusement la donne. Qui aurait pu imaginer qu’un jour il faille une attestation dérogatoire pour aller chercher une baguette de pain, consulter un médecin, promener son chien ? Qui aurait imaginé la limitation à un périmètre d’un kilomètre autour de chez soi pour les petits déplacements, l’impossibilité d’aller voir ses enfants au-delà de 100 km, l’obligation de porter un masque en tous lieux, la fermeture des magasins “non essentiels” ?  En 2017, tout le monde aurait prédit une révolution face à de telles mesures liberticides. L’effet de sidération face au virus hyper médiatisé et le chantage à la peur nous ont fait accepter l’impensable. La même sidération peut arriver demain si l’économie mondiale vacille et le même chantage à la peur nous fera accepter la fin du cash.

                Si nous devons réagir, c’est maintenant, en s’appuyant sur l’exemple Covid et en proposant d’autres alternatives économiques. Il est même possible que cet acharnement à supprimer le cash, accepté cette fois par le FMI, la BCE et la BRI, soit l’occasion inespérée de comprendre que le système monétaire est à bout de souffle, que ses principales instances sont en état d’alerte, et qu’il existe une voie inexploitée, celle de passer de l’échange marchand à l’organisation de l’Accès (Voir), et donc sans argent, qu'il soit numérique ou matérialisé. Il est temps de préparer l’avenir au lieu de réparer le navire de la finance qui fuit de toutes parts…